Extraits choisis de messages envoyés à Valérie Pécresse

 

Voici quelques extraits (courts) des nombreux courriers envoyés à V. Pécresse. Le choix en est bien évidemment subjectif. Il a été guidé principalement par la volonté de traduire le malaise et le désarroi de la communauté universitaire et de recherche face à un gouvernement sourd et brutal dans ses méthodes. Les nombreuses argumentations "techniques" sur les réformes et leurs conséquences ont été volontairement écartées (elles sont déjà exposées dans de nombreux documents et sites). La publication de ces extraits n'était pas initialement prévue, mais la lecture des premiers courriers envoyés nous a convaincu de l'intérêt de les rendre publics pour mieux faire comprendre l'état d'esprit de la recherche française.

 

 


La recherche est un métier de passion, on ne fait pas cela pour l'argent, on ne compte pas nos heures, nos week end et soirées passés à lire, rédiger ou corriger. Les laboratoires se vident de leurs techniciens et ingénieurs, de leur savoir faires, autant de compétences qui bientôt nous priverons d'un bel avenir post-crise.

Considérer les chercheurs comme vous le faites depuis plusieurs années est triste et risque de faire fuir l'innovation à l'étranger.

Nous étions dans un pays de lumière, de savoir et de connaissances, ne retombons pas dans le siècle des ténèbres .


Je viens d'être recruté au CNRS. Je suis jeune et donc plein d'espoir.

Pourtant, mon sentiment est d'être entré dans une institution en pleine déliquescence, loin de l'image que j'ai pu m'en faire pendant mes études. Je croyais que la France croyais.... et vous nous imposez une logique comptable, petite, manadgeriale. Vous vous trompez.

(...)

Sachez que je mettrai tout en oeuvre avec l'ensemble de mes collègues pour empêcher le saccage que vous opérez.


Je suis ce que vous pourriez qualifier de "bon chercheur" : je perçois la prime d'encadrement doctoral, mes enseignements sont bien évalués, j'ai un bon facteur H, 'écris des publications dans des revues et des conférences internationales reconnues, j'ai des doctorants et je participe à plusieurs projets au niveau local, national et
international, généralement en partenariat avec des entreprises innovantes. Je ne me sens donc nullement menacé par votre réforme.

Mais je suis aussi un scientifique et un intellectuel et mon métier est de réfléchir à l'avenir de la société. Et ce que je vois, c'est que les réformes que vous mettez en place conduisent à la disparition de la France sur la scène scientifique internationale à moyen terme. Nous, jeunes chercheurs, avons de plus en plus de mal à faire notre travail.

(...) Car, j'ai le regret de vous le dire, si la dégradation de notre métier engagée depuis ces 10 dernières années se poursuit, je finirai par démissionner de l'université.


Alors quoi, tout ceci ne serait qu'un énorme malentendu ? entre supposés dogmatiques du tout-libéral-vendu (le gouvernement vus par nous) et les dogmatiques du tout-syndical-figé (le corps universitaire vu par le gouvernement), pardonnez-moi cette caricature.
Nous sommes nombreux à vouloir des réformes. Qu'elles soient seulement justes et concertées ;
Madame La Ministre, les vôtres le sont-elles?


En moins de 30 ans le salaire d'embauche a diminué de moitié.

Et malgré cela nos laboratoires sont remplis de jeunes dont la passion est la recherche et qui se battent pour en faire leur métier.

(...)

L'Etat (c'est à dire nos impôts ) a investi des sommes considérables dans la formation de ces jeunes qui partiront ailleurs (Obama annonce une manne considérable) ou se recycleront en employés de banque ou en ébénistes (c'est véridique!)

QUEL GACHIS!!!!!!!!!!!


L'enseignement supérieur française est malade.. c'est un constat incontournable. Mais, Madame, la remède que vous proposez risque du tuer le malade!


Qui fera progresser notre pays si vous tuez dans les universités la liberté, l'égalité et la fraternité en même temps que la liberté de chercher et le désir d'enseigner?

Quel avenir préparez-vous à nos enfants?

Je souhaiterais personnellement avoir une réponse de votre part qui me permette de ne pas le voir extrêmement sombre!


Je soutiens totalement mes professeurs dans leur lutte malgré la menace que votre refus du dialogue fait peser sur mon semestre. Je préfèrerais mille fois me consacrer à mes études, mais tant que vous resterez sourde à aux revendications du monde de l’enseignement supérieur et de la recherche, je demeurerai mobilisé et solidaire de mes enseignants et camarades.


Je ne sache pas que cette colère qui anime nombre d'entre nous soit liée à un quelconque refus de réforme dû à je ne sais quel conservatisme obscur dont nous serions tous et toutes affublés de façon ontologique. Cette colère est liée à votre mépris, à votre refus d'écouter, de dialoguer, donc à votre surdité et à l'hypocrisie dont vous et vos collègues faites montre en prétendant que vous nous avez entendu.

(...) Non, le savoir n'est pas une marchandise, c'est un bien précieux qu'on acquiert, offre, transmet, qu'on enrichit collectivement et qui ne peut être côté en bourse.


Si, fonctionnaires, nous sommes aux services des citoyens, vous l’êtes également, et je ne pense pas que vos réformes constituent une avancées pour la France. Elles me semblent au contraire procéder d’une vision purement politicienne et menacent grandement la qualité de la recherche et de l’enseignement supérieur dans notre pays.


Réformer l’université française est évidemment indispensable, mais pas n’importe comment, ni à quel prix.


Je n’ai jamais eu de financement (parce que je suis fille unique et que je n’ai eu aucune information pour les bourses au mérite), je n’ai pas fait grève (parce que je n’en ai pas les moyens), je n’ai pas non plus été manifester (parce que je dois finir ma thèse). (...) Je suis très inquiète quant à mon avenir, en ces temps troublés. Ma thèse présente de nombreux aspects originaux qui sont loués par mon directeur de thèse et d’autres professeurs, j’ai écrit plusieurs articles et participé à différents colloques (j’en ai même organisé), tout cela en trois ans et demi ; je suis chargée des TD en L1 et L3, ce qui se passe très bien, et je me rend compte à quel point je suis passionnée à la fois par la recherche et par l’enseignement. Or, malgré tout ces points positifs, j’ai bien peur de n’avoir jamais l’occasion de devenir enseignant-chercheur. (...) Une solution serait de postuler aux USA, où les salaires et les conditions de travail des enseignants-chercheurs semblent meilleures qu’en France et les moyens de recrutements beaucoup plus impartiaux. Mais j’aime profondément la France, et ce serait pour moi un véritable déchirement que de devoir la quitter.


Je trouve incompréhensible et choquant que les acteurs du système de l'enseignement supérieur et de la recherche, ceux-là mêmes qui dispensent les savoirs et se chargent de la gestion administrative et technique de l'institution au quotidien, ne soient pas consultés dans leur ensemble quant aux améliorations à mettre en oeuvre pour faciliter son fonctionnement.


Je ne me sens ni comprise ni écoutée


Le monde entier nous envie le CNRS. Pourquoi remettre en cause de façon radicale une telle institution ? (...)

De façon générale, même si notre "secteur d'activité" a besoin de s'améliorer, les réformes radicales sans concertation sont bien évidemment très dangereuses.


Ne croyez pas que quand nous revendiquons les moyens de chercher sur le long terme (recherche dite fondamentale …) c’est que nous ne voulons que nous faire plaisir sans se soucier de ce qui nous entoure !!
Non la recherche fondamentale est liée à la recherche appliquée et réciproquement ! Chacune se nourrit de l’autre à un point tel que il n’y a pas de frontière entre les deux !
Ne confondez pas innovation (technologie) et recherche, la recherche conduira à de l’innovation c’est inéluctable !
Par contre l’inverse n’est pas vrai !
L’innovation ne se conçoit qu’à très court terme et est trop liée à rentabilité immédiate pour avoir une portée certaine.


Merci de ne pas tuer le service public de Recherche


Ne pensez surtout pas, Madame la Ministre, que l'universitaire que je suis n'est pas conscient qu'une réforme est nécessaire mais prenez conscience du fait que cette réforme ne peut être faite que dans la concertation (...) Je vous le répète, Madame la Ministre, je ne suis pas, les universitaires ne sont pas, contre une réforme nécessaire. Mais, de grâce, consultez-nous, prenez en compte les suggestions faites depuis cinq ans. Cinq ans ! Et, par ailleurs, cessez, comme le Gouvernement auquel vous appartenez et comme le Président de la République, de tenter de faire passer les enseignants-chercheurs qui s'élèvent contre ces réformes imposées et non négociées pour des nantis ne défendant que des privilèges acquis : je suis Professeur des Universités à la classe exceptionnelle, deuxième chevron, et mon salaire, avant ISR, est inférieur d'environ 4000 euros à celui de mes collègues néerlandais, lesquels paient l'ISR à la source. Nous ne sommes pas des traders, nous préparons les générations futures.


La communauté de la recherche et de l'enseignement supérieur a le sentiment de l'absence de tout dialogue utile avec vous, et d'un manque de sincérité dans vos discours.


Vous ne mesurez probablement pas les conséquences dramatiques qu'ont les réformes menées depuis quelques années sur la recherche francaise.


Nous avons l'impression oppressante que vous et vos amis nous font la guerre. Comment le gouvernement de notre pays peut-il faire la guerre à l'immense majorité des milieux de l'enseignement supérieur et de la recherche ? (...)

Sans l'ensemble de la communauté, il n'y aurait pas de prix Nobel, de médaille Field ni de prix Abel. La recherche en France est vivace, inventive, dynamique, malgré les attaques qu'elle subit depuis des années du pouvoir. Mais je la sens qui subit les coups, je vois les jeunes qui fuient, le découragement qui saisit tout le monde comme une chappe de plomb.


En tant qu'étudiant, je refuse l'ensemble des réformes concernant l'éducation, qui visent à détruire un enseignement de qualité, ouvert à tous. (...)

En tant que futur père, je refuse d'offrir à mes enfants une éducation au rabais, hors de prix, sans avenir, dirigée par de puissants financiers.
Je refuse de sacrifier les générations futures.


Arrêtez cette entreprise de sape de l'enseignement et de la recherche français. Notre vocation, notre passion, notre dévouement n'y survivrons sans doute pas !


On ne s'oppose pas à l'amélioration du système, mais à sa liquidation. (...) comme beaucoup de mes jeunes collègues recrutés ces dernières années, j'en aime de moins en moins le visage ; votre politique en fait un repoussoir pour ces milliers de bonnes volontés, ces chercheurs qui, malgré un salaire et une reconnaissance misérables pour ce niveau d'étude, se dévouent à la science et à sa diffusion, sans compter leur temps. (...) lourde responsabilité que vous porterez avec ce gouvernement coupable d'avoir commencé à défaire ce qui a fait le prestige d'une institution vieille de plus de 900 ans !


Si on détruit ce qui fait la vigueur de la recherche française il faudra des décennies pour la reconstruire. Votre responsabilité est grande face à l'Histoire.


Je suis fière d'avoir été formée à l'université.
J'aime l'université et je m'efforce d'y transmettre mon savoir avec enthousiasme.

Aujourd'hui, je n'accepte pas que le gouvernement fasse le choix de détruire l'université!

Le système universitaire n'est pas parfait, il a ses défauts, il a besoin d'être amélioré , mais les réformes que vous mettez actuellement en place, et la loi LRU que vous faites appliquer vont à l'encontre de ces améliorations.


Je vous prie d’entendre, madame la ministre, les voix de ces milliers de chercheurs et enseignants-chercheurs qui réclament de véritables discussions sur les réformes. La recherche et l’enseignement supérieur valent bien cela.


Alors que je suis favorable à la mise en place de réformes dans le monde de l’enseignement supérieur et de la Recherche, je m’oppose vigoureusement aux réformes que vous souhaitez mettre en place. (...) Les réformes que vous proposez sont incompatibles avec le monde de la Recherche, que vous semblez fort mal connaître.


Avec tous mes respects, vous nous mettez dans une situation extrèmement embarassante, nous qui ne souhaitons qu’une chose, travailler.


Je ne m'oppose pas aux réformes en tant que telles mais je demande, à l'instar de tous mes collègues, des réformes concertées, négociées entre les deux parties et non pas des réformes subies, imposées qui n'ont qu'un seul but : annihiler l'Université et la Recherche Publiques et les rentabiliser pour que le savoir devienne une nouvelle marchandise et que la recherche ne soit qu'appliquée.


J'ai intégré le CNRS par passion. Or après bien des sacrifices pour y arriver, voilà que l'institut dont je "rêvais" se transforme peu à peu d'un institut de recherche indépendant et libre en agence de moyens, pilotée par le pouvoir politique et au service exclusif de la rentabilité. (...) La recherche est d'une part une oeuvre collective, et d'autre part une activité qui demande un minimum de sérénité et de confiance dans l'avenir. Les réformes en cours sont donc extrêmement dangereuses pour l'avenir de la recherche française, et par conséquent, à plus long terme, pour l'avenir de la France.


Je travaille 70 h par semaine pour mener de front toutes les missions qui me sont imparties, tout autant passionnée par l’enseignement que par la recherche. Je ne peux pas comme beaucoup d’autres, accepter votre incompréhension du problème. (...) Face aux attitudes de mépris et de prise de pouvoir de notre gouvernement, nous ne pouvons que rester mobilisés et continuer à manifester notre colère dans la rue.


Contrairement à ce que vous affirmez, nous ne sommes pas contre les réformes et nous ne connaissons pas le conservatisme.
Notre colère est liée à votre mépris, à votre refus d'écouter, de dialoguer, donc à votre surdité et à l'hypocrisie dont vous et vos collègues faites montre en prétendant que vous nous avez entendu.


Une éventuelle transformation des EPST en agences de moyens, la poursuite du déssaisissement de leurs instances au profit d'agences sous contrôle politique, comme l'ANRS ou l'AERES, ne peuvent avoir que des conséquences dramatiques sur la recherche française, car l'échelle de temps à laquelle travaille un gouvernement ou un ministre n'a rien à voir avec celle du développement des connaissances.


Je suis en train de perdre l'envie de travailler comme chercheur dans les conditions annoncées.
Je crois qu'il ne faut pas sous-estimer le rôle de l'envie, du goût de leur métier chez les chercheurs. C'est leur carburant.


Je prends un peu de mon temps pour vous dire mon incompréhension et ma colère devant la façon dont vous traitez le milieu de la Recherche et de l'Enseignement Supérieur.

Nous sommes pourtant dans notre grande majorité extrêmement dévoués à notre mission et souhaitons que l'Education et la Recherche deviennent VRAIMENT une priorité pour le pays.

Pourquoi donc n'écoutez-vous pas toutes ces voix qui s'adressent à vous ?


Les chercheurs ne sont pas uniquement force de protestation négative mais aussi et surtout force de propositions. Ils en ont faites et ils en font encore : Ecoutez-les !
De plus, mais j'espère que ce sont juste des approximations de communication, je trouve déplorable la façon dont vous dénigrez toute une profession en stigmatisant les chercheurs comme des gens inefficaces juste bon à profiter du système. Je trouve ce genre de méthodes très basses de la part d'Hommes politiques.


Je me demande vraiment quel est l'objectif de ce gouvernement. La seule chose tangible qui ressort et qui marquera durablement mon esprit est ceci :
- je suis un imbecile de ne pas comprendre que les reformes vont etre bonne pour la recherche en France. (...) Je suis chercheur au CNRS, embauche depuis 3 ans, et je vais chercher un autre job. Mais rassurez-vous, pas en France


Je crains de ne plus avoir assez de temps à consacrer à la recherche, je crains que les étudiants que je forme ne puissent plus exercer un métier comme le mien, je crains de voir les jeunes se détourner encore plus des filières scientifiques et des métiers de la recherche, je crains que toute créativité et prise de risque soit abolie dans nos activités de recherche, je crains que le système d’enseignement français devienne inégalitaire.


Médaille d'or du CNRS (...), je puis vous assurer que mes propres recherches n'auraient pu être menées à bien dans notre pays s'il avait fallu qu'elles fussent retenues à l'avance par une agence de recherche sur projets.


Le monde de la recherche était prêt à se réformer, vos actions ont tout gâché.


Ce métier est pour moi l'accomplissement d'une passion qui m'habite depuis l'enfance, comme pour beaucoup de mes collègues.
Contrairement a l'image que vous et vos collègues et supérieurs au gouvernement propagez, comme mes collègues, j'y consacre donc un temps et une énergie  considérable. La notion de durée du service après laquelle le travaille s'arrête n'existe pas dans les laboratoires du CNRS comme le mien - la réflexion et le travail continuent souvent les nuits, WE, ...


votre entêtement à privilégier votre carrière politique fait perdre du temps à tout le monde.


Je ne prendrai pas plus de votre temps. Je veux également consacrer le mien à ma recherche. Je vous invite simplement à venir nous rencontrer : venez visiter nos labos, venez y rencontrer l'efficacité, l'excellence, l'inventivité, qui ne sont le résultat ni d'incitation financière, ni de compétition, ni de quête du pouvoir, mais simplement de la passion.


Si je n’avais pas la passion, les compétences et l’épanouissement dans mon métier d’enseignant-chercheur, je ne le ferais pas. Si je devais refaire ce choix aujourd’hui, comme un grand nombre d’étudiants, j’y verrais plus d’obstacles que d’encouragements de la part de votre ministère. Et pourtant, sans école, sans formation et sans recherche, aucun pays n’a d’avenir.


Le gouvernement dont vous faites partie détruit tout ce qui fait la richesse de la France sur le plan culturel, de la santé, de l'éducation, de la recherche fondamentale sur l'autel du profit et de la rentabilité à court terme.


Tous le monde vous dit que ces réformes sont dangereuses, les gens qui font la recherche, les têtes pensantes de notre beau pays et ceux qui les aident vous le disent....
La recherche est une force et la recherche Française, même si elle n'est pas parfaite est forte et belle dans sa diversité.
Ne cassez pas tout s'il vous plait et discutons des façons de l'améliorer encore.


Tous ces chercheurs (parmis lesquels les plus éminents) qui vous disent que votre réforme n'est pas la bonne se trompent-ils, ou serait-il possible que votre réforme ne soit réellement pas la bonne ??


Directeur de recherche au CNRS, embauché il y a 19 ans (...) Le 22 janvier au soir, comme beaucoup de mes collègues, j'ai écouté avec effarement le discours du premier homme de l'Etat, sur la recherche. Je me suis senti profondément insulté par un discours infantilisant, pétri de mépris, accumulant les invectives, et surtout truffé de mensonges. (...)

Alors oui, ce jour-là, je me suis dit que quelque chose était cassé. Une forme de confiance non dite. Et j'ai posé des jours de grève. Et je suis allé grossir les cortèges dans la rue. Je continue mes travaux, bien heureux de disposer de quelques fonds (pour combien de temps encore ?). Et je m'interroge sur l'émigration : Angleterre, Chine, Suisse, USA ? J'en discute en famille. Les enfants râlent. Mon épouse réfléchit. Parfois me traverse même l'esprit l'envie de tout laisser tomber. Comment continuer à exercer mon métier dans un pays où les "élites", relayés par un obscurantisme rampant, réinventent la structuration de la recherche sans même être issus de notre monde, sans connaître de l'intérieur ce que représente la recherche, la découverte, comment on y parvient,...


Mais pour être parfaitement franc, je suis à la limite de la rupture. Une activité de recherche compétitive n'est pas compatible avec un service d'enseignement de 192 h complètement fragmenté, et des taches administratives innombrables. Une activité de recherche de haut niveau s'effectue avec des sacrifices lourds en termes de vie familliale. Je n'ose même plus parler de vie privée.


La science c’est comme faire l’amour : parfois quelque chose d’utile en sort, mais ce n’est pas la raison pour laquelle nous le faisons


Vous allez finir par me dégoûter de mon métier…


Madame, je suis étudiant en M2R et actuellement je suis de plus en plus inquiet vis à vis des possibilités pour moi et mes collègues de faire de la recherche dans mon pays. Il y a de moins en moins de postes, de moyens et de considération.


Passion, collectif, créativité, efficacité, investissement personnel, quelques mots pour décrire notre activité dans la recherche.
Tracasserie administrative, blocage budgétaire, réduction d'effectifs, déformation de la vérité, quelques mots pour décrire votre soutien à nos activités... et aujourd'hui mépris, insultes et désinformation pour imposer des réformes qui n'ont aucun sens et qui auront des conséquences dramatiques pour la recherche.


Comme un grand nombre de mes collègues de l'Observatoire de Paris (et Meudon), je me vois contraint d'exercer mon activité scientifique la nuit, car une partie de mes journées se passe à essayer de vous expliquer que votre politique de recherche et d'enseignement supérieur n'est pas la bonne.